Des bâtons dans les roues

Avr 26, 2009 | america

« Pour conquérir sa liberté, le tout n’est pas d’atteindre l’Amérique mais d’oser quitter l’Espagne. Le plus difficile dans le changement, c’est de vouloir remettre en cause un choix… qui n’a jamais été fait ». Jacques Salomé

Chères vous toutes, chers vous tous,

S’il y a bien une news qui a été pénible à rédiger, c’est celle-ci qui restera incontestablement la plus chargée émotionnellement. Oui, l’aventure Muco-Vélo ne sera plus telle qu’elle a été vécue jusqu’à maintenant. Telle une parabole routière, la route a soudainement amorcé un tracé imprévu. Plusieurs dos d’âne un peu trop traître suivis de quelques virages serrés et des embuches bien dissimulées ont réussi à bouleverser les plans. Qu’il est brutal de devoir se réveiller au milieu de ce si beau rêve. Douloureuse réalité…

L’hospitalisation de Michel, début mars puis début avril en Suisse, ne laisse guère d’ambiguïté quant à la reprise prévue fin avril au Mexique. Une ribambelle d’examens effectuée affirme et confirme un bilan pulmonaire loin d’être convaincant. Intransigeante réalité…

Conscients de cette situation que nous rejetons pourtant, la sagesse nous souffle de stopper notre carrière commune d’Amérique-trotter. Pourquoi « s’époumoner » à garder rancœur contre cette maladie alors qu’elle demande qu’on s’essouffle déjà suffisamment pour elle? Le cœur voudrait plus que tout poursuivre alors que le corps, lui, implore et impose le repos. Mais comment alors concilier ces deux antinomies, ces deux états d’âme ? Est-ce tout simplement possible ? Raisonnablement réalisable? Sourde réalité….

Au sortir de ces mois « d’errances », notre cheminement intérieur, peut-être aussi long que celui parcouru en Amérique du Nord, ne nous a pas suffisamment préparé à envisager ces questions, encore moins d’y répondre. N’y voyez-là aucune forme de fatalisme, mais le renoncement, en guise de réponse, s’est tout « simplement » imposé de lui-même. Des bâtons dans les roues autrement plus importants qu’un cadre de vélo fendu dans le grand nord solitaire de l’Alaska. Une nouvelle épreuve en quelque sorte qu’il reste à accepter, à dépasser et si possible à sublimer. Renoncement : oui; abandon : non puisque la bagarre engagée contre la maladie continue.

Le sport, Michel, continuera à en faire régulièrement. Ce ne sera plus de l’ordre de la même intensité, ni dans le même environnement, avec modération, mais toujours dans le plaisir. Car oui, l’activité physique apporte un bénéfice indiscutable et le sport peut devenir une arme supplémentaire à tous et particulièrement pour nous les personnes atteintes de la mucoviscidose. Il serait dommage de ne pas saisir cet instrument de lutte, parallèlement au traitement quotidien. Une culture sportive où il est important de tenir compte des disparités même que la maladie de la mucoviscidose implique et des limites qu’elle induit.

Beaucoup d’inquiétudes et d’interrogations ont été formulées de la part de tout ceux qui suivent et s’intéressent (même de loin !) à cette aventure. Merci d’être présent, merci pour votre soutien, votre réconfort, vos mots. En se réalisant, nous ignorions encore qu’il n’est pas nécessaire d’aller là où le chemin mène mais qu’il vaut mieux encore laisser sa trace sur un chemin inexistant.

Une expérience d’une telle richesse, et faite de tant de contacts humains, d’efforts, d’émerveillements, de surprises aussi, nous a paradoxalement renvoyés à notre propre vulnérabilité, à nos limites, celles qui vous (r)attrapent aux grands carrefours de l’existence. C’est dans le constat de cette force fragile que de nouveaux choix ont pu être imaginés. Bien sûr que la maladie est toujours présente. Bien sûr qu’on ne la guérit pas grâce au sport comme certains ont voulu le comprendre (?!). Mais en construisant ce projet, nous avions un souhait commun : celui de vivre un Rêve en y associant un projet associatif visant à mieux faire connaître la mucoviscidose ainsi qu’une récolte de fonds. Ce combat, nous l’avons mené et nous le menons, parfois maladroitement, mais de façon entière.

Comment pourrait-on oublier toutes ces nuits sous tentes, la bonté des gens, la camaraderie, l’effort et la joie qui s’y associe, l’air vicié des bords de route, la liberté ? C’est en se dépossédant de ce qu’on nomme « l’indispensable » qu’il est possible de s’enrichir. Un sourire est une valeur forte et sûre (en ces temps de crise… !), communicatif, il fait autant de bien à celui qui le donne qu’à celui qui le reçoit. Une monnaie au taux de change des plus équitables en somme ! Souvent, durant ce voyage, nous nous sommes aperçus que le véritable bien-être se trouve dans le partage, le don. Notre plus grande Richesse, durant ce vagabondage imprécis, est probablement celle d’avoir su risquer… Se risquer hors de soi, se perdre pour (mieux) se trouver. Un état de nécessaire déprise.

Espérant retrouver son vélo et tout le matériel laissé à Puerta Vallarta, c’est de cela qu’il sera question pour Vincent à son “retour” au Mexique. Car OUI, après avoir repoussé son vol de quelques semaines, l’Aventure, placé sous le drapeau Muco-vélo, continue !!! Acte 2 : Amérique centrale.

Même si l’idée de poursuivre seul a été un cap à passer, il n’en demeure pas moins que, pour Vincent, cette suite s’est mise en place petit à petit, au gré des circonstances, mais non au détriment d’une certaine confiance. Difficile pour Vincent de poursuivre seul et difficile pour Michel d(e)’(s’)arrêter. Comment ne pas y voir là, au-delà de toutes descriptions propres au voyage, une représentation imagée des liens d’amitiés qui nous lient ? Bien Lové (confusément il s’agit de l’anagramme de vélo) au cœur des Amériques, je te souhaite, nous te souhaitons tous de la vaillance et des vents favorables, Amis même, qui en feront de cette suite une échappée splendide.

Il aura fallu un bon coup de fouet pour oser (s’)annoncer le coup de feu du lundi 27 avril 09. Il aura le goût d’un “nouveau début”. Séparé par la distance mais unis et animés par de nouveaux projets, nous nous élancerons et relancerons conjointement sur la route de la vie, celle qu’on ne trace qu’une fois. Rejoignez-nous et sourions : la suite n’en sera que plus Belle. Vámonos !

A très bientôt pour de “nouvelles” nouvelles.

Michel et Vincent

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